Partie 9 - Le Conflit

Zynel observa de son grand œil l’arrivée de Nyzel, l’entité qui représentait l’équilibre du Cosmos. Si des émotions pouvaient être lues au plus profond de la nature de Nele, aucune n’apparaissait sur la face unique du grand œil de l’étranger. Il ne semblait ni surpris, ni curieux, comme s’il connaissait toutes les raisons qui avaient amenées à cet instant, à cette rencontre. Et tandis que ces derniers se faisaient face à l'extérieur du vaisseau de l'espèce inférieure, son grand œil se mouva de quelques degrés vers le côté, observant le confin de l’espace.
Nyzel, quant à lui, sur ses gardes, fut étonné qu’il parut presque invisible et inintéressant à son oeil. Il était pourtant sûr d’avoir interrompu une conversation entre eux. Mais quand il vit le profond regard de cet unique œil se diriger loin derrière sa personne, il en fut autant intrigué qu’offusquer. À son tour, il se retourna et observa le Cosmos infini.

- Nous ne pouvons rester. Fit une voix dans la tête de l’ancien Équilibre.

Nyzel fit de nouveau face à l’étranger qui, cette fois-ci, le regardait fixement.

- J’emporte Nele. Nous ne pouvons assister à la suite.
- Qu’est-ce qu’il va…

Mais Nyzel fut interrompu par ses sens, ressentant une, non deux forces s’approcher de l’endroit. Et tandis qu’il observa devant lui le même phénomène qui l’avait alerté, Nele traversa une faille au beau milieu du vide, suivis par Zynel dont l’œil s’apprêtait à disparaître.

- Qui êtes-vous ? Lança inextrémis l’ancien Équilibre de l’univers.
- Un observateur… Nous nous reverrons bientôt.

Et à ces mots, les deux individus disparurent sous les yeux de Nyzel. Il n’eut pourtant pas le temps de s’en remettre que les présences qu’il avait ressenti approcher n’était plus qu’à quelques lieux de lui. Il ne reconnut d'abord pas la première, la plus proche, qui ralentissait déjà de manière séquencée, comme s’il rencontrait des obstacles. Mais il comprit bientôt la raison soudaine de cet arrêt. En un instant, plus rapide que son regard ne pu suivre, un astéroïde le frôla, continuant sa course au travers du vaisseau humain qui voguait toujours non loin. Ce dernier, d’ailleurs, n’était plus. Il venait d’être détruit, comme souffler par la vitesse du météor. C’est alors qu’un autre, plus petit, un troisième plus gros, un quatrième, puis une pluie toute entière de roche lui fonça dessus. Et plus ces rochers traversaient le Cosmos vers sa direction, plus l’individu, caché à l’origine de ces impacts, s’approchait de lui. C’était Yzen. Transformé à jamais pas le premier Astéroïde qui pourfendit la Terre et transforma l’homme en Nele. Yzen qui, de sa nature passive devint le seul rescapé de toute son espèce et acquis une armure organique que le souffle cosmique de cet Astéroïde étranger lui avait fait acquérir. Après que toutes les roches soient passées à côté de Nyzel, Yzen se présenta à lui. C’était un livre ouvert, un livre de souffrance, de colère, de rancune, qui n’avait pour but que de détruire comme il avait été physiquement et psychologiquement détruit.

- J’ai suivi votre empreinte à travers le Cosmos. Cette même empreinte qui jadis extermina les miens, et dont je me suis juré d’effacer à tout jamais de notre univers.

Mais Nyzel s’inquiétait bien davantage de l’arrivée de l’autre individu. Il n’avait guère pris conscience que sa propre existence était la cause de toutes ces destructions. Que la conséquence de son origine avait fait apparaître cet Astéroïde Destructeur, qui nacquit aux confins du Cosmos et pris route vers son opposé pour détruire tout ce qui se trouvait devant lui. Il n’avait pas pris conscience que son existence même ferait perdurer le Chaos au sein de tout, et qu’Yzen, comme Nele, et comme bien d’autres encore étaient les victimes de sa propre existence.

Yzen ignorait cela, mais soupçonnait qu’il ne fut pas innocent de posséder la même empreinte que ce rocher destructeur. Et pour lui, s’il n’en était pas la seule raison, restait le principal acteur pour une rédemption totale. C’est alors qu’il s’élança droit sur son adversaire, avec la ferme intention d’annihiler ce dernier, quand, tout proche de sa cible, son corps se ramollit sous la pression d’une force qui dépassait l’entendement. Une force qui ne pouvait s’expliquer. Une force qui n’avait aucune raison d’exister. Une force qui rendait insignifiant autant son existence que toutes les existences de toutes les choses vivantes ou non, animées ou figées qui pouvaient apparaître dans le Cosmos.

Elen arriva.

Nyzel, tétanisé de ressentir autant que de voir la toute Créatrice de l’univers, ne put rester en place que par la volonté de sa conceptrice.
Yzen quant à lui, n’était qu’un grain de poussière, ignorant et ignoré, qui fut balayé et projeté autant que la galaxie toute entière qui entourait Elen quand le Bang de son arrivée retentit. Oui, tout fut soufflé. Et Yzen compris à cet instant le sens des mots de l’Observateur. Qui pouvait-il être pour comprendre que la Créatrice arrivait ? Qui pouvait-il être pour s’échapper de cette dimension ? Qui pouvait-il être pour ne craindre la présence d’Elen ?

Elle regarda sa création avec attention et douceur, comme une mère envers son enfant. « Nyzel » fit-elle pour dénommer l’ancien Équilibre. Elle le regarda, le contempla même, comme si elle était fière d’avoir créé une telle personnalité.

- Nyzel, reprit-elle de sa voix cosmique qui parcourait le vide comme s’il était plein, où est-il parti ?

Pourquoi posait-elle une question pareille ? Pourquoi la Mère de toute chose s’interrogeait ? Pourquoi ignorait-elle la réponse ? L’ignorait-elle vraiment ? Cela ne se pouvait. Cela ne se pouvait.

- Nyzel, reprit-elle encore montrant des signes d’excitations incompréhensibles, où est-il ? Où est-il ? Je l’ai senti. Je l’ai senti et il a disparu.
Nyzel semblait manquer de souffle même s’il n’en avait guère besoin pour exister. Il était choqué d’être face à elle, choqué d’avoir été nommé, mais plus encore choqué de ne comprendre ce qu’il se déroulait devant lui. L’incompréhension de la Création. Un concept qui ne devait pouvoir s’appliquer à celle qui l’avait conçu. Comment ? Comment ? Comment…


01/10/2019