L'histoire d'Ultratis

Ultratis

À l’origine du monde, 7 fruits célestes écoulaient leur jus à travers la terre. Du jus de ces 7 fruits naquirent toutes les espèces végétales, animales et bactériennes.
Ces 7 fruits poussaient sur 7 grands arbres.
Les ultrantes, un peuple civilisé du début de l’ère planétaire recueillirent les 7 fruits et utilisèrent leur pouvoir afin d’évoluer et de prospérer à travers les âges. Les ultrantes ne pouvaient boire ni même toucher le jus de ces fruits divins, mais leurs machines permettaient de recueillir cette substance et de l’utiliser dans tous les domaines, aussi bien dans la longévité, que la médecine ou les sciences et même davantage.
Les ultrantes furent toutefois frappé par un énorme tremblement de terre qui, s’il n’avait eu qu’un effet sur les secousses et les mers, n’aurait pas causé d’importants dégâts. Mais ce jour-là, les réceptacles des sirops célestes se brisèrent et le jus des 7 fruits se mélangèrent et se déversèrent sur un érudit ultrante qui méditait en contre-bas du palais. Au contact du mélange, l’ultrante aurait dû disparaître, se désintégrer, mais le mélange unique changea à tout jamais le destin de cette cité et de l’avenir de cette planète.
L’érudit qui receva en un flot compact l’ensemble des 7 fruits se métamorphosa en un être qui ne pourrait jamais plus apprécier la compagnie d’autrui. Ses cellules se mêlèrent au céleste et il renaquit tel un être invincible, immortel et destructeur.
Lorsqu’il recouvra ses esprits, l’ultrante observa que toute sa cité, jadis si prospère et joyeuse, n’était plus qu’un amas de cendre que sa transformation avait vaporisé tout autour de lui.

Les ras-de-marées engloutissaient sa cité et son corps, quant à lui, immortel et invincible, avait acquis pour principale caractéristique la destruction de toute chose qui s’approcherait de lui de moins d’un mètre. Toute chose. L’eau qui se déversa sur sa cité, se désintégrait sans changement d’état au fur et à mesure qu’elle frappait l’être unique qui s’était transformé. En lui, coulait les 7 fruits célestes à tout jamais, comme les dalles de marbres qui en furent imprégnés lors de l’écoulement de ces liqueurs.
Des milliards d’années durant, l’évolution des espèces qui survécurent au déluge continua de suivre son cours, et l’ultrante, prisonnier de ce monde, ne laissa derrière lui que le récit de sa vie sur ce marbre qui avait reçu le jus des 7 fruits.

Lorsque s’éleva les homo-sapiens-sapiens comme nouvelle civilisation émergente, que des millénaires d’histoires passèrent et que les hommes acquirent les plus avancées découvertes, 4 morceaux de 7 tablettes d’origines et d’époque inconnues restèrent un mystère qui justifiait de nombreuses convoitises.
Une confrérie vit le jour afin de découvrir de quoi parlait ces 7 morceaux de tablettes dont la langue n’avait encore jamais réussi à être déchiffrée.

« Je suis une observatrice. Mon travail est de trouver les quelques rares personnes capables de lire naturellement les inscriptions de ces tablettes. Parmi tous les observateurs qui existent à ce jour, nous possédons tous une poussière de l’une des 7 tablettes au creux d’une bague. Cette dernière ayant la particularité de devenir luminescente en présence d’un être capable d’interagir avec les tablettes, même si cette dernière n’en a pas encore conscience. Et vous êtes l’une de ces personnes. »

- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler. Je ne suis pas intéressé. Laissez-moi tranquille.
- Veuillez lire cette photographie.
- Laissez-moi tranquille s’il vous plaît.
- Lisez ceci ou je tuerai votre petite-amie.
- Vous êtes folle.
- Lisez ou je tire.

« L’Ultra deviendra invincible, immortel et solitaire. Sa vie ne sera que désolation et abandon. Sa structure moléculaire changera et son ascension créera une destruction immédiate de tout ce qui vit et qui est autour de l’Ultra sur plus d’un kilomètre autour de lui. Pour devenir Ultra, apposer votre main, et souhaitez devenir l’Ultra. »
Voilà ce qui était écrit sur la photographie de cette folle, qui me sortait alors le morceau de tablette. Elle m’invita à accepter la prédiction et à devenir l’Ultra sinon quoi elle appuierai sur la gâchette et tuerai une personne innocente. Devais-je seulement y croire ? Si cela s’avérait vrai, alors je tuerais moi-même celle que j’aime ainsi que tous ces innocents et serais voué à vivre seul jusqu’à la fin des temps. Si je m’y refusais, je la perdrais aussi sans n’avoir rien pu faire. Peut-être que ces mots n’étaient pas si dangereux. Comment aurais-je pu ne pas m’y résoudre pour la sauver ?

Je devins l’Ultra et tout ce qui existait autour de moi à cet instant, disparu, comme vaporiser, supprimer de la réalité. Ni l’observatrice, ni ma petite-amie, ni personne ou quoique ce soit n’existait plus autour de moi. Mon corps n’avait pas changé, mes habits avaient disparu, mais dans mon esprit, je savais que je venais d’éradiquer des milliers de personnes en obtenant un pouvoir que je ne voulais pas, pour des gens qui ne savaient rien de ce qu’ils étudiaient.
Je restais des jours, peut-être des semaines durant sur le sol, à être triste de cette situation sans qu’aucune larme ne puisse couler de mon être. Toute chose qui existait autour de moi à un mètre de distance se désintégrait. Si j’avançais vers un arbre, il se désintégrait au fur et à mesure que je m’en approchais.

Pouvais-je seulement être triste ? Regretter ? Étais-je encore définissable d’humain ? Pouvais-je ressentir encore une quelconque émotion ? Je le croyais volontiers jusqu’à ce les premiers hommes arrivèrent à moi. L’armée, oui, qui me mirent en quarantaine, tentant de bien des manières de m’approcher et de m’étudier. Mais rien ne pouvait résister à ma présence. Je ne subissais aucune faim, aucune fatigue, je restais éveiller à tout jamais sans ne jamais craindre un quelconque mal que celui d’être mortel pour les autres.

Un mois passa et toutes les télévisions du monde parlaient de moi, de l’existence d’un être intouchable et peut-être immortel. Un être à l’apparence humaine qui plus est, et dont l’identité avait pu être confirmée. Quand ce fut au tour des parents, des proches de s’approcher de moi, je ne pouvais plus que craindre de les détruire à leur tour sans jamais plus ne pouvoir les approcher.
Qu’étais-je devenu, si ce n’était un monstre sans espoir ni but, coincé sur un rocher où toute chose ne pouvait qu’endurer ma présence.
J’étais même devenu une arme pour le gouvernement, recevant à bonne distance, de nombreuses propositions pour être utile à la nation. D’autres observateurs qui possédaient ces poussières de tablettes vinrent à moi, se prosternèrent devant moi comme si j’étais pour eux un Messi. Et pourtant, je ne ressentis aucune satisfaction à leur présence. Ceux qui m’appréciaient pour ce que j’étais devenu, m’avais ôté tout ce que j’aimais dans mon ancienne vie. Pouvais-je seulement parler de nouvelle vie ?

Au bout d’un certain temps, immobile au milieu de ce cratère de destruction que j’avais causé en devenant un Ultra, un individu s’approcha de moi. Il n’avait pas peur de moi, et était nu également. Il faisait nuit cette fois-là et il traversa avec la même simplicité que j’aurais eu à le faire, l’immense muraille qui avait été bâtie tout autour de moi.
Il avait l’apparence d’un homme, et bien que ses lèvres ne se mouvèrent pas, je l’entendis me parler. Il était comme moi. Et comme moi, les Ultras étaient télépathes.
Il me donna son nom, le nom qu’il s’était choisi des siècles durant. Il se nommait Uldraca. J’étais le premier autre Ultra qu’il voyait depuis qu’il était devenu ainsi, au XVème siècle. La destruction de tous les êtres qui lui étaient chers l’avait poussé à se reclure dans les profondeurs de son domaine, et d’éviter autant qu’il le pouvait le jour, où les gens étaient le plus à même de le voir, donc de mourir.
Il fit naître de nombreux contes à son sujet, rendant son expérience plus aberrante encore, se privant pour le bien du monde tout entier, de l’étoile qui nourrissait la toute puissance d’un Ultra.
Les rayons de lumière d’une étoile faisaient vibrer nos cellules et nous procuraient notre puissance destructrice. Il m’expliqua que venir jusqu’à moi sans être découvert, passant à travers les territoires seulement de nuit, lui avait pris tous ces mois. Et qu’aujourd’hui encore, tant qu’il restait loin des rayons du soleil, il pouvait jusqu’à approcher un être humain sans le tuer.

Malheureusement, venir jusqu’ici pour me voir était aussi pour lui un acte inespéré, cherchant des réponses à sa solitude de plusieurs siècles. Avait-il connu d’autres Ultras avant lui ? Il me raconta tout ce qu’il avait appris de l’histoire d’Ultratis, la cité oubliée et les 7 fruits célestes. Le premier ultrante à s’être métamorphoser aurait réussi à se défaire de son destin et à prodiguer, à travers une tablette, son pouvoir sacré en l’échange de son âme. Était-ce donc le seul moyen de réchapper à cette loi infernale ? Croire en l’âme et l’abandonnée ?

L’armée et autres spectateurs du monde entier ne prirent plus longtemps pour observer la présence d’Uldraca à mes côtés et cela sembla l’atteindre d’une quelconque manière. Il n’était pas en danger, mais il n’avait plus reçu de rayons lumineux depuis plus de 5 siècles, et s’il n’arrivait pas à s’extirper de la zone avant le levé du jour, alors qu’arriverait-il à son corps ? Deviendrait-il plus destructeur encore que nous le sommes actuellement ?
Il me supplia de le frapper de toutes mes forces si jamais cela devait se produire. Pourquoi le frapperais-je ? Risquerai-je de le tuer ? De vaincre l’immortalité par ma propre force destructrice ? Il me supplia d’essayer, même s’il ne pouvait lui-même se résoudre à faire de même, craignant rester seul à tout jamais.
Nous discutâmes encore de longues heures sur ce qui était possible de faire pour aider le monde à évoluer. La guerre ne cesserait pas en allant s’opposer au conflit. Nous tuerions pour le compte d’autres, et cela ne changerai rien aux situations, voire pourrait les rendre pire encore.
Il nous était possible d’accéder au fin fond des océans, sans en subir ni la pression, ni la crainte d’un danger. Mais il me rappela que tout se détruisait autour de nous, jusqu’aux particules d’air essentielles à la vie. Et que dans l’eau, la pression de ce fluide se déversant sur nous, nous pourrions à nous seul éradiquer la moindre goutte d’eau salée de la planète en nous retrouvant dans les profondeurs océaniques et en méditant quelques années ou siècles durant.

Nous discutâmes encore de nombreuses heures car c’était pour lui la première conversation qu’il eut en plusieurs siècles sans craindre de tuer son interlocuteur. Toutefois, nous ne fîmes pas attention au jour qui se leva doucement, et quand il s’en aperçu, ce fut trop tard. Il me supplia de le frapper de toutes mes forces avant qu’il ne recouvrât une puissance destructrice qu’il avait fui pendant des siècles.
Je ne savais quoi faire, le frapper allait-il le détruire ? Allais-je tuer sur sa demande, le seul individu qui me ressemblait ? La première lueur atteignit son corps et je compris de quoi il parlait, que ce qui résidait en nous se nourrissait, comme si ces 7 fruits existaient toujours au sein de nous et que nous étions voués à n’être qu’un réceptacle pour préserver leur toute puissance.
Il s’inquiéta que jamais plus il ne pourrait se cacher des hommes qu’il avait réussi à berner par des contes jusqu’ici. Jamais plus il ne pourrait rester en paix à cause de la curiosité humaine à vouloir comprendre et obtenir notre état. Pour lui, s’en était trop. Il me menaça alors, me disant que si je ne faisais rien, alors il me frapperait de toute ses forces en premier. Voulait-il vraiment me tuer ? Était-ce seulement possible de s’atteindre l’un l’autre ?
Les rayons de lumière nourrissaient à présent son être pour la première fois depuis des siècles et je le voyais espérer, me supplier d’arrêter cela. Que pouvais-je faire ?
Que se passerait-il si je le frappais ? Étais-je plus dangereux que ma simple limite de destruction ? Pouvais-je créer plus de chaos que ce qui disparaissait déjà chaque seconde en ma présence ? Il voulait essayer. Et si j’arrivais à l’atteindre, alors peut-être arriverais-je à m’atteindre ?
Il s’approcha de moi et me jura qu’il allait me frapper. Je n’étais pas encore prêt à mourir. Tout cela me paraissait encore si nouveau. Je n’y ai plus réfléchi, et dans un élan de spontanéité, j’envoyais mon poing en plein abdomen d’Uldraca.



Ce qui s’en suivit… la désolation, la fin du monde. Je compris alors que je venais d’anéantir la vie sur terre. Non, pas la mienne, mais celle de toutes les autres espèces vivantes. La déflagration que provoqua ma frappe sur le corps d’Uldraca fendit la planète, pulvérisant toute matière qui se trouvait dans ma trajectoire. Qu’était-il advenu d’Uldraca ? L’avais-je pulvérisé en même temps que le monde ?
Tout s’obscurcit en quelques instants, et les millions d’individus qui se trouvaient sur la trajectoire disparurent en un instant. Des raz-de-marée s’élevèrent au-dessus des plus hauts gratte-ciels, les volcans se réveillèrent et en quelques heures, je me retrouverai seul, immortel et invincible sur un rocher sans vie qu’on appelait il y a encore quelques minutes, la Terre.
01/10/2022